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9-Les oubliés du R'n'R "Amos MILBURN"

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hencot
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9-Les oubliés du R'n'R "Amos MILBURN"

Message par hencot »

AMOS MILBURN

L'importance du poulailler

-Ce que j 'ai dit, je l'ai fait.
Ainsi parlait Amos Milburn en juillet 1979, se référant à ses vieux tubes. Des tubes tels que Bad, bad whiskey ("Méchant, méchant whisky"),
Let me go home, whiskey ("Laisse-moi rentrer à la maison, whisky") et One scotch, one bourbon, one beer ("Un scotch, un bourbon, une bière").
- j'avais une bonne descente. j'adorais le scotch. Et le diable me disait toujours : "Continue, Amos, bois tout ce que tu veux, ça te fera jamais
aucun mal. Je me bourrais la gueule en deux temps trois mouvements .
La voix de mon interlocuteur était faible, presque éteinte. Elle ne ressemblait guère à la voix fraîche et forte qu'Amos Milburn avait, trente ans
plus tôt, à vingt-cinq ans; une voix qui chantait sans fin les saxophones rédempteurs, le croisement et le décroisement des genoux gainés de
nylon, l'autoroute à huit voies des Kool sans filtre, et le miracle de Notre-Dame de la Boîte de Nuit. Mais la fête était finie depuis des années.
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Amos Milburn naquit à Houston (Texas) le 1er avril 1927.Il sortit du lycée avec les honneurs en 1942, à quinze ans. Mentant sur son âge, il s'engagea
dans la Marine pour toute la durée de la Deuxième Guerre mondiale et servit pendant trois ans comme aide-steward à bord d'un navire de
débarquement d'infanterie. Les batailles livrées à Guadalcanal, à Bougainville et aux Philippines laissèrent à Milburn treize cicatrices.
Son jeu de piano boogie-woogie était très demandé dans les clubs d'officiers sur toutes les îles. Le 5 mai 1945, âgé de dix-huit ans, Milburn retourna
à la vie civile. Revenu à Houston, il forma un petit groupe et écuma les clubs.
Un soir où il jouait dans une boîte de San Antonio en 1946, une femme nommée Lola Anne Cullum, épouse d'un dentiste de Houston, vint trouver
Amos et lui expliqua qu'elle avait récemment créé une agence d'imprésarios à Houston. Peu après, ils étaient associés. Lola Anne fit enregistrer
à Milburn des démos brutes de décoffrage qu'elle envoya à la firme Aladdin de Los Angeles. En septembre de la même année, elle se rendit
sur la Côte Ouest avec Milburn (ainsi qu'avec un certain Lightnin' Hopkins, une autre découverte de Lola Anne).
Le 12 septembre, Milburn gravait ses premiers disques pour Aladdin
Son troisième disque - une reprise du tube de Don Ray, Down the road apiece ("Un peu plus bas en descendant la rue"), créé en 1940 et repris
en 1964 par les Rolling Stones eut un certain succès, mais il fallut attendre 1948 pour voir Milburn atteindre la première place du classement
rhythm'n'blues avec sa composition , Chicken shack boogie ("Le boogie du poulailler").
Chicken shack boogie était un rock dur vantant les mérites des innombrables boîtes de nuit disséminées dans les banlieues du Texas - des endroits
où l'on pouvait manger, boire, et souvent jouer jusqu' à l'aube et même au-delà. (cinquante ans plus tard, les poulaillers sont toujours là.
La prochaine fois que vous viendrez à Austin, débrouillez-vous pour trouver Webberville Road, suivez cette route jusqu'à ce qu'elle se perde dans
un tas de crasse, et vous tomberez sur Ernie's Chicken Shack, "le Poulailler d'Ernie". Mais abstenez-vous de jouer aux dés.)
Pendant plus de dix ans, de 1946 à 1957, Amos Milburn grava quelques-uns des disques les plus durs de l'histoire du rock'n'roll. Ils reposaient
sur le son brut de la guitare électrique, sur le couinement ivre du saxophone ténor (habituellement tenu par le grand Maxwell Davis) et, évidemment,
sur le piano et le chant de Milburn. Dans Walking blues ("Le blues qui marche", 1950) et Roll M . Jelly ("Roule, M. Jelly",jeu de mots sur jelly roll,
(le gâteau roulé),c'était aussi le surnom de Jerry Roll Morton, "Ferdinand Joseph la Menthe"(1885-1941), pianiste qui se proclamait "l'inventeur du Jazz"
et auteur dans les années vingt, d'un morceau intitulé Mr.Jerry Lord) Amos fanfaronnait à propos de ses prouesses sexuelles.
Dans la première de ces deux chansons, il se déclarait capable de ressusciter une morte rien qu'en remuant la quéquette en direction de son cadavre.
Avec Let's rock a while ("Secouons-nous un moment", 1951) et Rock, rock, rock (1952), il contribua à définir l'archétype des paroles du rock'n'roll
qui allaient, quelques années plus tard, faire sauter en l'air les Blancs.
Bad, bad whiskey , 1950), Just one more drink ("Encore un petit verre", 1951), Let me go home, whiskey , 1953), One scotch, one bourbon, one beer ,
1953 , Good, good whiskey ("C'est bon, c'est bon, le whisky", 1953), Vicious, vicious vodka ("Cruelle, cruelle vodka", 1954) et Juice,juice, juice
("A boire, à boire, à boire!", 1956) : toutes ces chansons parlaient du démon de Milburn, la gnôle. (Il enregistra même en 1954 un rock sur le sevrage:
Milk and water, "Du lait et de l'eau".)
One scotch, one bourbon, one beer, en 1953, fut le dernier tube d'Amos Milburn. La firme Aladdin disparut à la fin des années cinquante.
En 1960, Milburn fit un simple pour King; puis, en 1962, il signa un contrat avec la nouvelle firme Motown, qui fit paraître un simple et un album,
Blues boss , mais rien ne se passa. Il n'y avait pas de place dans la soul music pour la musique de poulailler vicelarde que jouait Milburn.
Milburn continua jusqu'en 1968. En 1969, il eut sa première attaque. La deuxième survint en 1970, un jour qu'il était allongé sur un canapé à regarder
un match de football à la télévision . Elle le laissa infirme. Il arrêta de boire et retourna à Houston. Il me dit:
-J'ai toujours mes Kool Super Longs. J'ai mon eau glacée et mon Coca-Cola. J'laisse pas entrer une goutte d'alcool à la maison, ça non, m'sieur.
Quelqu'un veut venir me voir, faut qu'il laisse sa bouteille à la porte. Je vis en chrétien maintenant, et je m'en remets au Seigneur.
Je pense que, si le Seigneur avait voulu que j'arrête de fumer des Kool, il me l'aurait fait savoir, comme il m'a fait savoir ce qu'il pensait de l'alcool
en m'envoyant ces deux attaques.
Quatre semaines avant notre rencontre, il s'était fait opérer:
- Il m'ont enlevé une jambe. Celle qui battait la mesure sur tous ces bons rock'n'roll et tous ces chouettes boogie-woogie, sur le vieux piano.
Ils l'ont amputée net.
Voilà. Le premier grand pianiste du rock'n'roll, vivant d'une allocation d'invalidité de la Marine, avec ses Kool Super Longs. Il en était là.

Moins de six mois plus tard, j'appris la mort d'Amos Milburn, le 3 janvier 1980.
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Fichiers joints
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Alain..

Site sur le son et l' enregistrement de Claude Gendre http://claude.gendre.free.fr/
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