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10-Les oubliés du R'n'R "Roy BROWN"

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hencot
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10-Les oubliés du R'n'R "Roy BROWN"

Message par hencot »

ROY BROWN

Ça va bien secouer ce soir

ROY Brown, l'homme qui écrivit et enregistra pour la première fois Good rockin 'tonight ("Ça va bien secouer ce soir"), avait gravi les échelons
du rock jusqu'au sornrnet et était retombé plus bas que terre avant même qu'Elvis se soit fait dépuceler.
Voici comment il voyait les choses:
-Je revois le colonel Parker en train de dire: "Je suis persuadé que les gosses blancs veulent écouter du rock'n'roll, mais je ferai faire ça par un
garçon blanc." Autrement dit, si vous voulez écouter Good rockin' tonight, je ferai faire ça par Elvis Presley. La plupart de ces gars-là reprenaient
le truc et copiaient les arrangements note pour note, mais comme ça, c'était accepté.
Brown se souvient d'Elvis, qu'il n'a rencontré qu'une fois, en 1954, quand ce n'était qu'un pauvre petit con de Blanc essayant de se frayer un
chemin vers la scène pendant l'un des concerts de Brown :
- On jouait pour le chef de la police de Tupelo, dans le Mississippi. Mon chef d'orchestre, qui était mon guitariste en ce temps­ là, s'appelait
Edgar Blanchard. C'était un gars de la Nouvelle-Orléans - il est mort maintenant - qui aimait boire. Elvis s'est pointé. Il voulait chanter, mais
Edgar ne voulait pas le laisser monter sur scène. Elvis s'est aperçu qu'Edgar aimait boire, alors il lui a dégotté une grosse bouteille d'alcool
de contrebande.
-Tupelo était une ville prohibitionniste -,et quand je suis revenu du vestiaire, qui se trouvait dans la maison du chef de la police, Elvis était là,
sur la scène, en train de jouer et de chanter avec eux. Personne ne lui prêtait la moindre attention. Quelques mois plus tard, pendant ma tournée
sur la Côte Ouest, Tommy Shelvin, mon bassiste, me dit: "Hé, mec, y'a un péquenaud qui joue ta chanson ."
Sans mentir, Elvis était en train de chanter cette chanson avec un groupe de hillbilly. Mais ça ne se vendait pas, parce qu'il n'était pas encore
devenu Elvis, tu vois ? Ouais, ils sont morts tous les deux maintenant, ce vieil Edgar et ce vieil Elvis."
Il est sage, quand on écoute ce genre de personnage, de garder à l'esprit l'avertissement de Shakespeare sur "les vieillards qui ont moins de
vérité que de langue". Mais il y a au moins une chose de vraie dans tout cela : le fait que, comme beaucoup d'autres, Roy Brown fut l'un des
créateurs de cette chose bizarre et exaltée que fut le rock'n'roll, dont on crédite généralement Elvis et quelques autres jeunes gars.
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Roy Brown naquit à la Nouvelle-Orléans le 10 septembre 1925. Sa mère, True Love - "Véritable Amour" - Brown, était mi­ Algonquine, mi Noire;
elle dirigeait une chorale et jouait de l'orgue. Son père, Yancy Brown, était plâtrier et maçon. La famille se trimbalait de ville en ville, au gré des
chantiers du père, à travers la Louisiane rurale. Roy travailla pendant quelque temps dans les champs de canne à sucre de Morgan City et de
New Iberia. Là-bas, il n'avait guère l'occasion d'entendre du blues; on ne jouait que des spirituals.
Roy avait quatorze ans à la mort de sa mère. Trois ans plus tard, après avoir terminé le lycée, il partit s'installer à Los Angeles. Il devint boxeur
et sortit victorieux de seize des dix-huit combats professionnels auxquels il participa dans la catégorie des poids welter. Mais la vue du sang le
rendait malade, et il dut abandonner la boxe.
En 1945, au Million Dollar Theater de Los Angeles, Brown gagna un concours de chant amateur en imitant Bing Crosby dans San Antonio rose
("La rose de San Antonio") et I got spurs that jingle jangle jingle ("J'ai des éperons qui font clic-clac-clic"). Crosby était le chanteur favori de
Roy Brown, et celui-ci n'avait pas honte de l'avouer. Il dit n'avoir jamais écouté de blues jusqu'au début des années quarante, où il entendit
Jelly jelly ("De la gelée, de la gelée") par Billy Eckstine et When my man comes home ("Quand mon homme rentre à la maison") par
Ella Johnson.
Brown rentra en Louisiane et décrocha son premier emploi régulier de chanteur au Billy Riley's Palace Park . Il chantait des trucs tels que
Stardust ("Poussière d'étoiles") et Blue Hawaii ("Triste Hawaï"). Avec le recul, il se dit qu'on l'avait engagé parce qu'il était quelque chose
de nouveau : un type de couleur qui chantait comme un Blanc.
L'inverse d'Elvis Presley, en quelque sorte.
II quitta Shreveport pour Galveston (Texas), où il écrivit la chanson qui l'a rendu célèbre. Ravivant en moi le souvenir des vers du quinzième
sonnet de Shakespeare il me confia :"
-Je pense qu'on était le premier groupe noir qui soit passé à la radio dans ce coin. A l'époque, je chantais There's no you ("Tu n'es pas là"),
un truc de Bing Crosby. Mais je venais d'écrire une chanson appelée Good rockin' tonight. On a ajouté un trompettiste au groupe.
Il s'appelait Wilbert Brown, et quand on a fait notre émission de radio sur la station KGBC, il a chanté Good rockin' tonight.
Le destin voulut qu'un jour Wilbert tombât malade, et ce fut Roy qui chanta la chanson. Le public apprécia, et elle devint un tube local.
Ce fut à Galveston qu'il fit son premier disque, chez Gold Star .
Brown dut s'enfuir de Galveston, car on l'avait surpris en train de sauter la petite amie du propriétaire du club dans lequel il se produisait.
A la Nouvelle-Orléans, il fit la rencontre de Cecil Gant, autre futur héros oublié. Gant entendit Brown chanter Good rockin' tonight et le présenta
à Jules Braun, le patron de la firme DeLuxe. Le premier disque de Brown pour DeLuxe, Good rockin' tonight, sortit en septembre 1947.
Pendant trois ans, Roy continua d'enregistrer chez DeLuxe. Sa voix se fit de plus en plus dure, de plus en plus sauvage. Il n'était plus seulement
un chanteur pop exceptionnel -comme Crosby, Sinatra, Prima ou Nat Cole -, mais l'une des premières vraies voix du rock'n'roll.
Lorsqu'il enregistra Hard luck blues ("Le blues de la déveine") - le numéro un le plus morbide qu'on ait jamais vu dans le classement
rhythm'n'blues -, en 1950, Brown était en possession d'une voix dont peu d'autres chanteurs ont su égaler le timbre graveleux et la puissance.
La firme King racheta son contrat en 1950, et Brown se fit rouler dans la farine par la même occasion. Il finit par se tourner vers sa compagnie
de droits d'auteur et le syndicat des musiciens pour rentrer en possession des sommes qui lui revenaient, ce qui lui valut d'être mis sur la liste
noire. Après son tube de 1951, Big town ("La grande ville"), Brown continua d'enregistrer chez King, mais il n'y eut plus de tubes et, partant,
plus de grosse galette.
Il quitta King, mais un peu tard, en 1955. Pendant les deux années suivantes, il enregistra chez Imperial. Ses versions de Party doll
("Poupée fêtarde"), de Buddy Knox, et de Let the four winds blow ("Les quatre vents peuvent souffler"), de Fats Domino, furent des tubes pop
mineurs, mais à partir de 1959 Brown était dans une situation si désespérée qu'il retourna chez King pour deux séances d'enregistrement.
En 1960 et 1961, il grava quatre simples pour la firme Home of the Blues - "La Maison du Blues"- à Memphis.
Comme si Je sort voulait se moquer de lui, ces disques maudits furent produits par l'ancien guitariste d'Elvis, Scotty Moore.
Les années soixante passèrent lentement pour Roy Brown. Il fit quelques séances pour des firmes véreuses telles que DRA et Connie & Mobile.
Chess lui fit enregistrer quatre morceaux mais les garda sous le coude. Il devint représentant de commerce, se servant, pour entrer chez les Noirs
d'un certain âge, de photos dédicacées le montrant sous les traits de l'ex-vedette qu'il était:
-J'ai vendu un tas d'encyclopédies de cette façon-là.
Brown recommença d'enregistrer en 1967. Il fit un album chez Bluesway - "la Voie du Blues" - intitulé Hard times ("Les temps sont durs") ;
des simples chez Gert et Summit - des firmes de Los Angeles qui touchaient le public local - et pour des maisons de disques qu'il avait lui-même
créées: Tru-Love - et Friendship .
En 1971, un an après son apparition remarquée au festival de Monterey en compagnie de Johnny Otis, il fit deux simples chez Mercury.
La plupart de ses nouveaux morceaux étaient aussi bons que ceux qu'il jouait vingt ans plus tôt, mais il gagnait moins d'argent qu'en vendant
des encyclopédies. En 1978, il sortie un album, The Cheapest price in town ("Les prix les plus bas de la ville"), sur sa propre firme Faith .
C'était l'un des meilleurs albums de l'année et l'un des plus cochons, mais il ne se trouva pas plus de quelques milliers de gens pour l'entendre.
Mais, selon l'expression consacrée, qu'est-ce que ça peut foutre ?
-Je conduis une Monte-Carlo neuve, ma femme roule en Chevron. C'est le bonheur .
Il n'eut pas à s'inquiéter pour la reprise de son ancienne voiture. Son cœur cessa de battre le 25 mai 1981 à Los Angeles.
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Alain..

Site sur le son et l' enregistrement de Claude Gendre http://claude.gendre.free.fr/
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